Benjamin est fâché

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J’étais en train d’écrire pour mon blogue sur le unschooling (un des sujets les plus chers à mon coeur) quand Benjamin est monté. Au son que faisaient ses pieds sur les marches, je savais qu’il n’était pas content.

Il était furieux! Il venait juste de recevoir une note en français. La plus basse note qu’il ait reçue de toute sa carrière d’étudiant.

J’ai alors pris conscience qu’il avait besoin de moi.

Il y a eu avec les années une évolution dans ma façon de répondre aux besoins de mes garçons. Quand ils étaient bébé, j’arrêtais ce que je faisais pour répondre à leur besoin aussitôt qu’ils me le communiquaient. Que ce soit un besoin physique ou un besoin émotif, je réagissais de la même manière, dans l’instant.

J’avais choisi de le faire ainsi parce que répondre aux besoins des enfants les fait sentir en sécurité. La sécurité intérieure permet aux petits humains de se développer de façon favorable à l’épanouissement de qui ils sont. La sécurité intérieure qui est déficiente nous fait vivre du stress émotif qui nous emploie à rester vigilant. Il n’est pas question de prendre des risques et d’ouvrir nos ailes quand on est concerné avec le besoin de surveiller nos arrières.

Quand mes enfants étaient tout petits, je répondais aux besoins de mes garçons dans l’immédiat. Puis éventuellement, je leur demandais d’attendre que je finisse une tâche ou une action lorsque c’était un besoin physique comme la soif. Je me souviens de ces moments où je sortais mes antennes, mon intuition à travers la connexion que je partage avec mes enfants, pour déterminer la teneur de leur besoin. En l’espace de quelques secondes j’évaluais la nature de leur besoin en me posant ce genre de questions: comment est son humeur, est-ce seulement la soif ou c’est la soif avec une humeur maussade? Mon questionnement me permettait de répondre de façon adéquate aux besoins de mes enfants.

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Quand c’était un besoin purement physique sans côté émotif, je me permettais de les faire patienter. De quelques secondes à éventuellement avec les années, à quelques minutes. Puis, à l’adolescence, c’est plutôt une conversation. Ils peuvent maintenant répondre à la plupart de leurs besoins physiques, et lorsqu’ils demandent mon support, si je suis occupé, on jase de la situation pour déterminer comment procéder.

Ça peut paraître long et fastidieux, mais en réalité ça prend quelques secondes à quelques minutes. C’est pour moi très important de procéder de cette façon, parce que ça envoie le message qu’ils sont, tout comme moi, importants et que je respecte, comme je l’ai fait depuis leur naissance, leurs besoins.

Les besoins affectifs, comme quand ils sont chamboulés par une situation, sont pour moi une priorité d’être répondu le plus rapidement possible. Je vais peut-être finir d’écrire une phrase ou une idée, mais je vais déconnecter de ce que je fais pour leur offrir toute mon attention.

À cinq mois, Léo pleure, j’arrête tout et je le prends dans mes bras.

À cinq ans, Léo veut du jus, je lui demande d’attendre juste un petit peu que j’aille terminer de plier le gilet.

À cinq ans, Léo pleure parce qu’il s’est fait mal, j’arrête tout et je le prends dans mes bras.

À dix-huit ans, Léo veut ouvrir un compte de banque, on s’entend sur le jour et le meilleur moment pour nous deux.

À 21 ans, Benjamin est en colère, j’arrête ce que je fais pour lui offrir le soutien dont il a besoin.

C’est tellement précieux d’avoir cette possibilité de le faire. J’ai le temps et j’ai la compassion nécessaire pour écouter Benjamin sans lui donner des conseils (les conseils coupent la connexion en faisant sentir la personne jugée).

Je suis à 100% dans le moment présent avec lui pendant qu’il marche très vite autour de l’îlot en parlant très fort. La professeur lui a enlevé beaucoup de points pour les erreurs d’orthographe parce que selon elle un projet professionnel dans son domaine pourrait se voir refuser s’il y a la moindre faute d’orthographe (WTF? Je sais autant que lui que c’est de la bullshit). Elle lui a aussi enlevé des points parce qu’il n’avait pas le nombre de mots maximum dans chacun de ses paragraphes. Il crie: « Maximum, mais y’avait pas de minimum!!! ». Il y voit une injustice et c’est une des valeurs qu’il a le plus à coeur.

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Après quelques minutes d’écoute attentive et de support, il se calme et il s’assoit. Je sens la lourdeur de son énergie s’alléger. Je n’avais pas besoin de lui donner des conseils ou même de lui faire un colleux (ce qu’il n’apprécie pas de toute façon). Juste d’être présente et le voilà reparti le coeur plus léger.

L’écoute attentive est un des plus beaux cadeaux qu’on peut offrir à nos enfants. On répond à leurs besoins affectifs dans un contexte qui favorise la maturation émotive par l’expression et la libération de leurs émotions. Je ne lui dis pas comment vivre ses émotions, je le laisse expérimenter pour qu’il trouve son propre chemin. Après tout, moi qui vient tout juste de trouver comment me réconforter, ça ne serait pas authentique de lui dire comment faire alors que ça m’a pris si longtemps à le découvrir parce que mes besoins affectifs de petite fille sont restés sans réponse.

En étant témoin et support, je découvre comment une personne évolue vers la maturité émotive lorsque ses besoins affectifs sont accueillis et répondus avec compassion et amour.

Julie xo