Quelle crise d'adolescence?

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Je suis toujours très triste lorsque j’entends des préjugés sur l’adolescence. Au fil du temps, on a créé une image peu flatteuse de l’adolescence et je me souviens, adolescente, combien j’avais l’impression d’être mise dans une petite boite avant même qu’on apprenne à me connaître. C’était déshumanisant.

Je sais qu’à l’adolescence, les parents sont parfois dépassés par les nouveaux comportements de leurs enfants. Ils sont surpris de cette énergie de confrontation et de ce besoin d’indépendance. Ils voient ces changements d’une façon négative et malheureusement, pour beaucoup, ne vont pas remettre en question leur part de responsabilité dans la relation. Les parents utilisant l’autorité sentent le besoin de resserrer le contrôle parce qu’ils ont peur des conséquences possibles. Possibles, mais pas certaines!

La seule forme d’autorité que je respecte est celle qui place le parent comme responsable de répondre et satisfaire les besoins physiques et émotionnels de ses enfants. L’autorité qui donne du pouvoir à celui qui l’utilise, de par sa position hiérarchique ou de sa force physique supérieure, pour forcer quelqu’un à faire ce qu’il ne veut pas faire, est de l’abus d’autorité selon moi. L’autorité ne devrait jamais donner le droit aux parents de faire souffrir leurs enfants.

Sans autorité, dans une relation bienveillante et respectueuse, où le jeune est accepté et aimé comme il est, il n'y a pas de crise d'adolescence. Sans autorité il n'y a pas de rébellion. L’autorité est la prison que les jeunes tentent de fuir en se rebellant.

Même si les gens croient qu’une relation d’autorité est la seule possibilité, ce n’est pas le cas. J’ai choisi d’offrir à mes enfants une relation basée sur la confiance plutôt que la méfiance et nous n’avons pas expérimenté les démonstrations typiques associées à la crise d’adolescence. Mes enfants ne m’ont jamais envoyé chier, ils n’ont jamais pris de brosse et ils ne m’ont jamais menti. Je ne les traite pas comme de la merde et je ne leur mens pas.

La crise d'adolescence est un cri du cœur pour reprendre son pouvoir en extériorisant la souffrance intérieure, la déconnexion avec les parents et avec la société en général. La crise d’adolescence exprime; je sens que je ne suis pas important pour vous, alors je vous montre que vous n’êtes pas importants pour moi.  La souffrance est violente pour celui qui l’a ressent. Elle est exprimée à travers la violence extérieure et intérieure (comportements autodesctrcuteur). Plus il y a de souffrance, plus il y a de violence et d’auto-destruction. 

Quand je vois des graffitis offensants sur les murs d’un immeuble, quand j’entends des jeunes crier dehors la nuit, quand je vois des jeunes se foutre de leur avenir, je vois de la souffrance et la tentative de s’en libérer.

Photo by Andrew Neel on Unsplash

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Comme pour les enfants, notre société déshumanise les adolescents en essayant de les contrôler plutôt que de les écouter avec compassion.

Quand le jeune est soumis à l’autorité de ses parents, il n’a que deux choix, continuer de se soumettre ou se rebeller. En tant que parent, je ne veux pas que mes enfants soient soumis à moi ou à qui que ce soit. C’est ici que les abuseurs de toutes sortes profitent de leur statut d’autorité avec des jeunes conditionné à se soumettre à l’autorité. Même si le choix de l’enfant de se soumettre au parent plaît davantage au parent, il n’est pas moins destructeur que de se rebeller. Dans l’un ou l’autre de ces choix, le jeune se perd et souffre. Il y a quelque chose en lui qui se brise.


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Dans cette série d’articles, je souhaite explorer ce sujet qui est plus vaste que je l’aurais cru quand j’ai commencé à taper sur les touches de mon clavier. J’ai beaucoup de choses à dire et c’est grâce à une amie qui a visionné l'a vidéo que j’ai crée pour le Sommet sur l’apprentissage en famille, coucou Marie Noelle, que j’ai sorti des boules à mites les notes que j’ai accumulées au fil des années sur ce sujet passionnant, l’adolescence.

 
 

La relation bienveillante et respectueuse

Depuis qu’ils sont jeunes, j’ai choisi d’aimer inconditionnellement mes enfants en leur offrant une relation bienveillante (La bienveillance, c’est quoi?).

Un aspect important de la relation bienveillante est le respect. Pas celui qui se vit à travers des croyances comme: “tu dois respecter les plus vieux que toi” ou “Je suis ton père et tu me dois respect”. Ce type de respect est imposé souvent à travers l’autorité utilisant la peur comme moyen de conforme le jeune. Le respect, ça se gagne en offrant notre respect et en le recevant en retour. Je ne sais pas pour vous, c’est peut-être mon esprit rebelle, mais lorsque je ne me sens pas respecter, je n’ai pas vraiment envie d’offrir mon respect en retour. 

Le respect, le vrai, n’est pas celui qu’on nous a imposé, mais celui qu’on choisit d’offrir dans une relation où on a confiance que l’autre personne est sécure émotionnellement pour nous. Qu’elle ne va pas nous faire souffrir sans prendre la responsabilité de ses actions, en s’excusant et en réparant la connexion.

Forcer et manipuler nos enfants à faire quelque chose qu’on a décidé qu’ils feraient sans prendre en compte leurs opinions et leurs émotions n’est pas du respect. Le respect ne force pas, il n’essaie pas de changer l’autre.

Scène du quotien, Léo qui nous fait encore des colleux.

Scène du quotien, Léo qui nous fait encore des colleux.

Plus facile à dire qu’à faire dans certaines situations

Respecter mes enfants n’est pas toujours facile. Il y a certaines situations où je sens monter en moi l’envie de les contrôler, d’utiliser l’autorité. Grâce à une sensation désagréable que je ressens dans ces moments, la paix intérieure m’échappant, je prends conscience de ma perception; je pense savoir mieux qu’eux ce qui est bon pour eux. 

Benjamin a tendance à se coucher tard. Il est comme Patrick, mon conjoint, et aime avoir du temps le soir pour jouer à ses jeux vidéos. De mon point de vue limité, il se couche trop tard et il est “souvent fatigué” le lendemain. Parce qu’il programme son réveil matin, je perçois qu’il ne laisse pas à son corps l’occasion de dormir autant qu’il en a besoin. 


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La semaine passée, il m’a dit qu’il sentait moins le besoin de jouer tard le soir parce que sa session à l’université était terminée et que son stress avait diminué. J’ai été surprise de découvrir que son besoin de se coucher “trop tard” à mon goût, est le résultat de son besoin d’équilibrer le stress que lui font vivre ses cours à l’université. Ma perception et surtout mon besoin m’empêchaient de respecter son besoin. Jamais je ne vais le forcer à se coucher plus tôt ou lui parler d’un ton supérieur, mais par moment je lui partage mes craintes et les effets que j’ai vécus en me couchant plus tôt moi-même.

Je ne sais pas pourquoi c’est un gros morceau pour moi. Est-ce que ça vient du fait que depuis que je me couche plus tôt je me sens en meilleure santé? Ma tête se dépose sur l’oreiller pas mal toujours avant vingt-deux heures et très souvent vers vingt-et-une heures. Est-ce que ça vient du fait que je perçois son comportement comme ayant un impact négatif dans sa vie? Et qu’il n’y a rien de plus important que leur bien-être?

Un réflexe que j’ai est de me demander: de quoi j’ai peur au juste? C’est quoi le pire qui pourrait arriver? Ça fait des années que Benjamin se couche tard, en fait depuis le début de son adolescence. Je sais que le besoin de sommeil et les périodes de sommeil changent pendant l’adolescence, quelque chose à voir avec le développement du cerveau, mais je croyais que maintenant, il a vingt-deux ans, je pensais que ça serait fini ce besoin de se coucher tard. Une peur qui pourrait être présente en moi est la peur qu’il ne se lève pas le matin pour aller à l’école ou au travail. Depuis qu’il a commencé l’école (à 16 ans) et à travailler à temps partiel pendant ses études, je peux compter sur une main le nombre de fois où il est passé tout droit. Donc, c’est une peur qui m’appartient, une peur qui m’a été probablement enseignée et que j’ai intégrée.

J’essaie de me rappeler que ce n’est pas parce que je choisis de me coucher plus tôt, que c’est la seule et bonne façon de faire. Et même si se coucher plus tôt faisait du bien à Benjamin, c’est sa vie et son droit d’expérimenter ses choix.


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La résistance que je lui oppose pourrait bien être un aspect motivant son besoin de se coucher plus tard pour reprendre son pouvoir en faisant le contraire de ce que je souhaite pour lui. Je comprends cette dynamique parce que je l’ai vécu moi-même. J’étais tellement dans la méfiance et j’avais tellement besoin de me déconnecter de mes parents, que je ne prenais pas le temps de ressentir si mes comportements faisaient un sens profond pour moi. J’étais tellement dans la souffrance que j’étais déconnecter de mon intuition et ma sagesse intérieure. J’étais en mode opposition et destruction.

Ce n’est pas ce que je souhaite pour la relation avec Benjamin, cette déconnexion. La déconnexion dans la relation avec le parent, déstabilise la connexion en nous. La connexion avec cette partie de nous qui est calme et sécurisante.

J’ai encore du travail à faire pour découvrir ce qui soutient cette perception pour pouvoir la transformer. Connaître la perspective de mon fils m’aide à mieux le comprendre, à ressentir de la compassion pour lui, mais ce n’est pas la fin, il me reste encore à choisir. Choisir la confiance et choisir le respect en le laissant vivre sa vie et faire les expériences nécessaires à tirer ses propres conclusions. Can I get an amen?

Julie xo

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